Catégorie : Italie

La Toscane de tous les rêves

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Constanza et Giovanni s’étaient retirés en Toscane, à Terriciola. Ils observaient les collines bleutées en buvant du chianti. Tout cela rappelait de nombreux souvenirs au condottiere. Ils visitèrent Pise et la chaire joliment sculptée dans le marbre de la cathédrale. Ils retrouvèrent la même facture à Sienne. Dans cette merveilleuse ville, ils admirèrent la fresque du bon gouvernement dans le palais de la Podesta, ainsi que celle représentant Guidoriccio da Fogliano. Giovanni salua le condottiere.  A Florence, ils admirèrent les fresques de la chapelle Tornabuoni dans l’église Santa Maria Novella  et se reposèrent dans le cloître.

Ils ressortirent sur la place et admirèrent la façade de l’église et son harmonie.

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Constanza dit à Giovanni que Florence paraissait idéale à présent, comme un cadeau du Ciel et que Giovanna Tornabuoni, dans l’éternité de sa Jérusalem céleste, semblait à présent inaccessible. Ils grimpèrent dans le ciel de la ville depuis le beffroi du Palazzo Vecchio et admirèrent l’image de Florence en contrebas.

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La majesté de la cathédrale et de son dôme surgissant des toits rouges des maisons et des palais indiquait un paradis qui se dérobait. Constanza et Giovanni redescendirent  et allèrent se réfugier dans une trattoria goûtant aux plaisirs terrestres, les seuls qui leur étaient autorisés. Encore une fois, ils se réfugiaient dans leurs rêves pour oublier leur condition de Bannis.

 

Extrait n°6

 

Florence

 

 

 

 

Niccolò Machiavel s’avança dans la bibliothèque du palais de la via Larga, où le maître de Florence aimait à se retirer pour méditer et pour écrire des sonnets. Le Magnifique interrompit sa lecture de Tite-Live pour saluer son ami :

« Approche, Niccolò. J’imagine que tu viens converser à propos des noces de Giovanni da Diansilva et de la jeune Laura degli Albizzi ?

– Tout le monde dans Florence ne parle que de cela ! Ce mercenaire, venu, dit-on, de France, voilà une belle consécration : épouser ainsi une jeune fille issue d’une des plus nobles maisons florentines, et aussi l’une des plus jolies filles de toute la ville, voire certains ont dit, d’Ourlandia toute entière ! Elle est également aussi sage qu’Hipazia. Marsile Ficin ne tarit pas d’éloges sur elle et les questions judicieuses qu’elle pose à propos de Platon !

– Est-ce pour me parler de la jeune fiancée, dont Ghirlandaio vient de faire le portrait, ou d’Ourlandia que tu es venu me voir, mon ami ?

– Lorenzo, tu sais que je te respecte, mais je n’approuve pas ta politique actuelle. Ce condottiere a mené nos armées victorieuses en Ourlandia depuis dix ans, permettant d’agrandir le territoire de la République, parfois au détriment de la papauté, ce qui n’est guère pour me déplaire… Mais, à présent, tu souhaites l’envoyer épauler le duc Sforza de Milan contre Venise et le royaume des deux Siciles du roi Manfred II ! Je considère ce dernier comme la chance de réaliser enfin l’unité d’Ourlandia…

– Au détriment de nos libertés ? Toute ma politique de ces vingt dernières années a eu pour but de préserver Florence contre toutes les forces ayant voulu s’y opposer, parfois même, tu l’as fait remarquer, contre la papauté. A présent, tu voudrais que je me range sous la bannière de celui que l’on appelle le nouveau César, hypothéquant notre avenir ? C’est un peu léger de ta part, mon ami !

– Tant qu’Ourlandia sera divisée, nous serons à la merci des Barbares, malgré l’héritage de l’humanisme, nous unissant par-delà les pauvres frontières qui séparent les Etats rivaux de la péninsule.  Les Alpes elles-mêmes sont incapables de nous protéger de l’invasion de ces Teutons et des Français. Ils viennent se tailler des empires chez nous et attiser nos divisions. Comme l’a bien dit Dante, nous ne resterons que des esclaves tant que le navire restera sans nocher !

– Crois-tu que ce Manfred formerait un rempart contre les invasions ? On affirme que le roi de France se prépare à réclamer l’héritage d’Anjou, lequel lui fut retiré voilà deux siècles par le premier Manfred…

– Il serait un meilleur rempart que nos divisions et les intrigues de la papauté.

– Pic de la Mirandole me presse de faire revenir à Florence son ami Savonarole. On dit qu’il prêche bien, notamment contre les excès du pape.

– Il prêche aussi contre le luxe insensé des Florentins ! Crois-moi Lorenzo, maintiens cet exalté le plus longtemps possible à l’écart ! Il ne te sera d’aucun secours.

J’y songerai, oui. En attendant, je dois me préparer pour les épousailles de notre condottiere. J’écrirai un rondeau sur les noces de Mars et de Vénus. »

Machiavel ne répondit pas. Son ami semblait plus que jamais décidé à poursuivre sa politique, une politique qui mettait de côté l’unité d’Ourlandia et, pensait-il, tout véritable désir de grandeur !… Florence, par l’intermédiaire de son condottiere auréolé de gloire, affronterait bientôt le jeune Manfred, un prince que l’on disait cultivé et pondéré, en qui Machiavel, à tort ou à raison, plaçait tous ses espoirs. Ainsi, Ourlandia resterait divisée, et pour longtemps la proie des puissances étrangères lorgnant vers sa richesse, comme autant de rapaces. Le Magnifique le retint à dîner. Le jeune Giovanni Pic de la Mirandole se joignit au groupe, et présenta ses conclusiones, qu’il s’apprêtait à défendre devant la papauté. Machiavel fut stupéfait de la hardiesse du jeune homme. Il risquait le bûcher, tant ses écrits, voulant retrouver la pureté de la foi, allaient trop souvent contre les dogmes. Le jeune homme s’en défendait. Il maintenait qu’il était parfaitement orthodoxe, que c’était au contraire une interprétation fallacieuse de la Tradition qui faisait par exemple qu’Origène était censé être damné pour l’Eternité. Machiavel lui recommanda d’être prudent, mais rien ne semblait entamer l’enthousiasme du jeune homme : grâce à lui, on comprendrait bien mieux, croyait-il, les subtilités de la foi !

*

Nous étions le 3 septembre 1486. C’était aujourd’hui que commençaient les trois jours de festivités en l’honneur de Laura degli Albizzi et du condottiere Giovanni da Diansilva. La foule enthousiaste se pressait aux alentours du palais Albizzi. Neuf jeunes gens à cheval attendaient l’arrivée de la fiancée, en compagnie des quarante jeunes filles qui escorteraient la future mariée au palais de Diansilva. Une telle suite défiait les lois somptuaires, mais pour le moment personne à Florence ne s’en formalisait. La jeune Laura sortit en rougissant du palais de son père, baissant timidement ses yeux bleus. Ses cheveux dorés étaient ornés d’épingles précieuses. Elle était vêtue d’une robe blanche, immaculée. Un serviteur l’aida à prendre place sur une haquenée, blanche également.  Le cortège s’ébranla en direction de l’est et du palais, où la jeune fille deviendrait femme. Sous les vivats de la foule, le cortège traversa le borgo Albizzi et s’arrêta bientôt devant le palais da Diansilva, au seuil duquel attendait le fiancé. Il venait de fêter ses trente ans. Auréolé de la gloire des batailles qu’il avait remportées, il imposait par sa stature. Vêtu de velours rouge, il portait le collier de la Toison d’Or qu’il avait autrefois remporté à la cour de Bourgogne. Ses boucles brunes dépassaient de son bonnet également rouge. Ses yeux gris contrastant avec sa peau cuivrée fixaient avec admiration sa fiancée toute pâle, que l’on aidait à descendre de cheval.  Il s’approcha timidement, s’inclina et lui baisa la main. Puis il prononça à son adresse quelques mots de bienvenue. Alors, sur l’estrade toute proche, qui avait été dressée sur la place de l’église santa Croce, on fit retentir des trompettes. Puis, le condottiere prit la main de la jeune fille et la mena à l’intérieur du palais. Des tables y avaient été dressées, et un olivier avait été placé entre les fenêtres du piano nobile. Le notaire s’approcha en compagnie des témoins (le Magnifique lui-même serait celui du marié !) et le contrat de mariage fut réglé. Puis on passa à table. Machiavel fut frappé par le luxe ostentatoire qu’affichait cet étranger. On distribua à chaque convive une pomme de pin passée à la feuille d’or. Le banquet fut servi. Le jeune Pic de la Mirandole semblait fasciné par la jeune mariée. Il ne tarissait pas d’éloge sur sa beauté et sa vertu. Il envisageait de faire d’elle sa dame platonicienne. Le jeune marié et le maître de Florence, quant à eux, parlaient déjà politique. Diansilva ne jugea pas inopportun d’attaquer le roi de Sicile. Quant aux éventuelles réactions du roi de France ; il se disait confiant pour l’avenir. Après le banquet, la jeune épousée fut intronisée reine du bal, sur l’estrade de la santa Croce. Assise royalement sur un banc, elle réglait les danses des jeunes gens. Elle sourit au jeune Giovanni Pic de la Mirandole. Celui-ci lui adressait des regards admiratifs tout en dansant. La nuit tombait. Le condottiere conduisit la jeune fille vers la chambre nuptiale.

*

Trois jours plus tard, au château de Diansilva, situé à quelques kilomètres à l’Est de Florence, la jeune Laura se serrait doucement et passionnément contre son mari, lequel observait la riante campagne avec ces douces et féminines collines au loin :

« Giovanni, mon aimé, viens te recoucher, n’as-tu pas encore envie d’aimer ta belle Laura ?

– Si bien sûr, ma douce, mais je suis préoccupé. Je devrai bientôt repartir en campagne contre les armées de Venise !

– Laisse là la politique et viens te livrer aux plaisirs de Vénus ! »

Ainsi fut fait… Giovanni s’attarda quelques jours dans la petite ville toscane au sommet d’une colline, dans le joli petit château à la tour altière. Puis, il quitta la bourgade entourée de remparts, à la tête de son armée.  Dix jours plus tard, il rencontrait les troupes du duc Sforza et se joignit à elles. Puis, il marcha sur Venise. Encore une fois le fracas des batailles et le lys rouge sur argent, la bannière guelfe, de Florence rentra victorieux ! Giovanni s’installa dans un palais du grand canal et dicta une lettre au Médicis. Celui-ci avait maintenant les coudées franches en Italie, si toutefois le roi Manfred II de Sicile n’attaquait pas. Cependant, il pouvait compter sur le roi de France pour venir l’épauler. Ce dernier ne réclamerait que l’héritage d’Anjou, autrefois volé par les Staufer, pour laisser Lorenzo former sa Ligue du Nord… L’opposition papale pourrait se résoudre par la diplomatie avec l’aide du Valois. Ainsi, le condottiere rentra t’il à Diansilva. Sa jeune épouse était maintenant enceinte de cinq mois.  Jamais il n’aurait cru ce qui allait advenir bientôt. Par cette soirée funeste du printemps 1487, Laura da Diansilva agonisait dans les douleurs de l’accouchement et le maître des armées d’Italie était impuissant…

La sage-femme pénétra dans la chambre, où attendait le condottiere en faisant les cent pas.

« C’est fini, maître. Je suis désolée.

– Et l’enfant ?

– Mort lui-aussi, Dieu l’ait en pitié !

– Laissez Dieu en dehors de tout cela. Comment peut-il tolérer une chose pareille ? M’enlever ainsi ma femme et mon enfant alors que je fais triompher le parti guelfe en Ourlandia contre ces maudits teutons ! Il devrait au contraire me bénir… »

La servante se signa et sortit à reculons. Giovanni resta seul, prostré, et contempla le soleil couchant à l’horizon, par la fenêtre bicentenaire aux arcades gothiques. Il se servit un verre de chianti et médita. Oui ! Dieu semblait l’avoir abandonné, à quoi bon conserver l’espoir à présent ?

La jeune Laura fut enterrée trois jours plus tard en l’église de la ville.  Les restes de l’enfant furent mis à l’écart, en terre non consacrée. Giovanni ne laissait rien apparaître de son abattement, mais au contraire une froide détermination : se venger de ce Dieu colérique et jaloux qui avait provoqué son malheur !

Une semaine plus tard, Niccolò Machiavel parut au château de Diansilva. Il était porteur de nouvelles. Le roi Manfred avait mobilisé une armée et marchait sur Rome. Les Français accouraient, mais il fallait prendre les devants, si Florence voulait rester maîtresse du sort d’Ourlandia. Le condottiere devait reprendre du service et porter l’armée à la rencontre du Teuton.

Diansilva balaya d’un revers les pièces du jeu d’échecs avec lesquelles il essayait de se délasser.

« Fort bien, j’irai !, hurla t’il. Je ferai encore une fois ce maudit travail de condottiere pour lequel Florence me paye, mais n’attendez pas davantage de moi ! »

Machiavel s’inclina et prit congé. Une semaine plus tard, Giovanni  chevauchait en tête de la longue colonne de soldats qui déroulait ses anneaux de reptile à travers la campagne romaine. On rencontra les Siciliens au pied du Mont-Cassin et cette fois-ci le sort fut défavorable aux armées du Lys. Giovanni décida alors de se retirer du monde dans la débandade générale qui suivit la bataille perdue.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Venise

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Ils étaient allés à Venise dans un temps qui semblait être une éternité. Ils avaient connu la cité de la lagune à l’époque des épices et des galères. Aujourd’hui demeurait la Ca’d’Oro, dont les fondations étaient noyées par le canal. Cependant sa dentelle gothique était intacte.  Giovanni se fit prendre en photo à l’intérieur.

Ils observèrent les trésors qui y étaient exhibés, dont le fameux Saint-Sébastien par Mantegna.

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Les lourds tapis d’autrefois, qui donnaient au palais un aspect oriental, avaient tous disparus et on aurait pu s’en plaindre amèrement.  Ils ressortirent et prirent le vaporetto jusqu’à l’Accademia. Ils se dirigèrent vers le gros bulbe de la Salute où ils dirent une secrète prière avant d’aller se reposer au café Florian.

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Là, il y avait ce vieil homme, l’historien de l’art François Lesage qui leur expliqua à quelles conclusions il était arrivé en comparant les fresques de Botticelli du Louvre à une gravure du songe de Poliphile.

Il les emmena à la bibliothèque Marciane toute proche et leur présenta le vénérable incunable dont Constanza conservait un autre exemplaire dans sa bibliothèque de l’appartement de la Nouvelle-Athènes.

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Les jours suivants ils errèrent dans la ville, en particulier du côté de l’Arsenal et de ses lions grecs.

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Extrait n°5

Le songe de Pic

 

 

 

Au palazzo da Diansilva, le condottiere Giovanni venait de tracer les mots de la fin sur le manuscrit racontant son histoire. C’est ce même texte que retrouva François Lesage quelques siècles plus tard. C’était une histoire inventée, même s’il avait été autrefois le duc de Diansyl. Il vivait seul à Florence et il s’ennuyait, car Giovanna ne vivait que dans ses rêves et que Constanza avait disparu avec elle… Il décida de se rendre à Venise, où il se retrouva au XXI e siècle, dans l’église de la Salute. Là, il eut la surprise de revoir Constanza.  Les deux amants restèrent un temps à Venise, dans le petit hôtel du Dorsoduro qu’ils affectionnaient, à quelques pas de la Salute, dont le dôme de marbre blanc se reflétait sur l’eau sombre du Grand canal, sombre comme leur conscience se disaient-ils ! Cette Venise était différente de celle d’Ourlandia, laquelle restait figée dans le XV e siècle… Elle était hantée par des âmes en peine, errant sans espoir de rémission dans les ruelles labyrinthiques de la ville, à la recherche de quelque exutoire à leur ennui existentiel. Giovanni regrettait Ourlandia, qui ne vivait plus que dans ses rêves, et Constanza lui parlait de la Bukhovnine comme d’un paradis perdu qu’elle ne reverrait sûrement jamais. A la bibliothèque Marciane, ils consultèrent le songe de Poliphile. Il s’agissait là d’un lien avec leur monde. Au café Florian, le couple rencontra un vieux Monsieur. Il se présenta : François Lesage, historien de l’art ! Ils discutèrent un temps de choses et d’autres, puis abordèrent le sujet des fresques et de l’ouvrage de Colonna. Alors, le vieux Monsieur se confia :

« Je suis allé à Florence pour la première fois le 7 Octobre 1955. Je ne sais pas comment j’ai pu attendre si longtemps. Je me souviens que, quand j’étais étudiant, j’allais admirer les fresques de la villa Lemmi au Louvre. Curieusement, je n’ai pas cherché à savoir qui étaient les personnages représentés sur les fresques. Peut-être étaient-ils des allégories, des dieux retournés aux cieux ? Je n’ai commencé mes recherches que beaucoup plus tard.  Lors de mon premier séjour à Florence, j’ai pu visiter la chapelle Tornabuoni, dans l’église santa Maria Novella, avec sa façade savante par Alberti. J’ai lu plus tard la monumentale étude de Ronald Lightbrown sur Botticelli. Peut-être toute mon histoire part elle de ces fresques du Louvre, que je connais depuis ma prime jeunesse ? Marcel Proust évoque la bella Vanna dans la Recherche… Les fresques se trouvent aujourd’hui dans un état pitoyable. Découvertes par hasard sous un badigeon de la villa Lemmi en 1873, elles furent détachées par un marchand florentin. La troisième d’entre elles, représentant Giovanni Tornabuoni en compagnie de sa fille Lucrezia, alors âgée de neuf ans, fut totalement perdue. Les deux autres, figurant Lorenzo Tornabuoni et sa fiancée Giovanna degli Albizzi furent acquises par le Louvre.

La villa, située à Chiasso Macerelli, sur la route de Fiesole, appartint aux Tornabuoni de 1469 à 1541, avec les terres qui les entouraient. Les Tornabuoni, alliés aux Médicis, étaient l’une des plus riches et influentes familles de Florence. Giovanni travaillait à la succursale romaine de la banque Médicis. Cependant, il fut élu prieur en 1471 et gonfalonier vers la fin de 1482. Son fils Lorenzo était né le 11 décembre 1468. Il avait étudié les bases de la connaissance (quadrivium et trivium), mais il était également un fin lettré, capable de lire le grec, tout comme son ami, le poète et humaniste Angelo Poliziano. Parvenu à l’âge d’homme, il devait reprendre les affaires familiales. Cependant, son père désirait pour lui une fiancée capable de le combler, alliant pulchritudo et castitas. Le choix du vieux Tornabuoni se porta enfin sur la plus jolie des Florentines : Giovanna degli Albizzi. Née quelques jours après Lorenzo, le 18 décembre 1468, elle était parée de toutes les qualités. Elle appartenait à un clan autrefois rival de celui des Médicis : les Albizzi. Au siècle précédent, ces oligarques avaient gouverné Florence d’une main de fer. Cependant, leurs maladresses politiques conduisirent à l’exil une partie du clan, ceci après la bataille d’Anghiari (29 juin 1440). Cette dernière assura à Florence le contrôle des Apennins et elle annonça la chute de Sienne, en même temps que celle des émigrants florentins menés par Rinaldo degli Albizzi. Les Albizzi restés à Florence entrèrent dans le système politique des Médicis et la jeune Giovanna servit cette stratégie…

Plus habiles, les Médicis évitèrent de gouverner directement, et la personnalité de Laurent le Magnifique (1440-1492) permit l’éclosion de la Florence humaniste. Le fait que cette vision moderne de l’individu se fût doublée d’une tyrannie politique peut surprendre, mais il en est ainsi depuis Périclès…

Par sa mère, le Magnifique était le cousin du jeune Lorenzo Tornabuoni. C’est lui qui négocia cette alliance. Où eut lieu la rencontre des jeunes fiancés, nous n’en savons rien ?… Pourtant…

Rappelez-vous la scène de la fresque du Louvre, figurant Lorenzo présenté par Vénus aux Arts libéraux ! Elle a lieu la nuit, comme dans un songe, dans la tradition médiévale (cf. Le Roman de la Rose, par exemple). Une image pratiquement identique figure dans le curieux ouvrage attribué au dominicain Colonna,  Hypnerotomachia Poliphili [i2].

L’œuvre a été publiée pour la première fois à Venise en 1499. Cependant elle pourrait avoir été rédigée plus tôt, ainsi que l’indique le corps du texte, lequel porte la date du 1er mai 1467. En fait j’ignore quelle image a influencé l’autre. Il ne s’agit peut-être que d’une ressemblance stylistique superficielle, mais cela me paraît improbable. Il doit y avoir un lien ! L’histoire de Poliphile, l’amant de Polia, dans cet épisode précis, le montre confronté à deux nymphes. La sage Logistica veut le conduire à la maîtrise de soi, tandis que la mystérieuse Thelemia le pousse à découvrir les trésors que lui offrent les six compagnes de Philtronia : Rastonelia, Chortasina, Idonesa, Tryphelea, Etiania et Adia. De dépit, Logistica brise sa lyre et s’enfuit. La raison a donc été vaincue par les sens. Dans la scène représentée par Botticelli, au contraire, Lorenzo est présenté par Vénus, patronne néo-platonicienne de la connaissance, aux Arts libéraux.  Cependant il se peut que derrière la scène se cache un avertissement ! Tout comme Dante, Lorenzo dans sa jeunesse se trouverait près d’être séduit par la philosophie…Tout comme Poliphile, Lorenzo cherche une femme. Sa Polia est Giovanna. Cette jeune fille a peut-être été rencontrée par lui, comme dans un rêve ?

C’était au printemps 1482, en mai, dans l’une des villas au charme paradisiaque que l’on peut admirer en Toscane, la villa du Poggio peut-être ? Lorenzo di Pierfrancesco de Médicis, un cousin du Magnifique avait commandé à Botticelli un tableau, à l’occasion de son mariage avec Sémiramide d’Appiano. Le jeune Lorenzo Tornabuoni était-il présent ? Ce n’est pas impossible, puisque le marié était l’un de ses parents. C’est là peut-être que pour la première fois il vit Giovanna ? Car, aussi curieux que cela puisse paraître, la jeune fille semble figurer au milieu des Grâces ! Il s’agit de la troisième, Thalia donc. Cette ravissante nymphe, d’une blondeur diaphane, tout comme l’était sans doute la petite patricienne, ressemble étonnamment aux autres portraits qui sont parvenus jusqu’à nous. La première fois que j’ai pu contempler ce tableau aux Offices, j’ai été immédiatement fasciné par elle. Cependant, il peut s’agir de l’une des sœurs de Giovanna, Albiera par exemple. Et peut-être le tableau a t’il été peint beaucoup plus tard, en atelier de toute façon ? D’ailleurs en y réfléchissant, peut-être que Giovanna, élevée dans un couvent, ne sortait-elle pas. La ressemblance de la nymphe reste donc un mystère. Pourtant, le bijou qu’elle porte avec ses trois perles semble la désigner comme une Albizzi. Mais comme il est différent de celui du portrait de Giovanna au musée Thyssen-Bornemisza, il ne s’agit peut-être pas de Giovanna. J’avoue que je me perds un peu dans la typologie de ces bijoux. Cela demanderait une étude particulière. Peut-on penser qu’à chaque pendentif à trois perles correspond une Albizzi précise ?  Dans ce cas, la jeune fille de la fresque de la villa Lemmi ne serait pas Giovanna mais l’une de ses sœurs ! Oui, mais laquelle et pour quelle raison figure-t-elle dans une villa appartenant aux Tornabuoni ? Le mystère de la deuxième Grâce de la Primavera, reste entier, lui-aussi. Ce qui est certain, c’est que le mariage de Lorenzo et de Giovanna a été célébré en grandes pompes le 3 septembre 1486 et non le 15 juin, comme l’écrit Lightbrown. Ce jour-là serait plutôt celui des fiançailles…

Le délicat portrait que nous a laissé Botticelli, sur la fresque réalisée à la villa Lemmi, nous montre une jeune fille, les cheveux à peine masqués par son voile de jeune mariée, toujours parée d’un rubis serti de trois perles, recevant de Vénus un bouquet de roses, à l’intérieur d’un linge blanc. Les fleurs ont aujourd’hui totalement disparu, mais elles étaient clairement visibles lors du dégagement de la fresque.

Mais revenons au Poliphile : en quelle année réelle le livre a-t-il été rédigé ? A partir de 1467, sans doute, mais certaines gravures n’ont pas pu être réalisées avant 1489, parce qu’elles utilisent la Cornucopiae de Niccolò Perrotti (Francesco Colonna. Biographia e opere, vol II, p. 138). Peut-être le livre n’a-t-il pu être réalisé après 1497, puisqu’il n’utilise pas les gravures de l’Ovide de Giovanni Bonsignore ? Si l’on considère l’hypothèse que Pic de la Mirandole a rédigé le Poliphile  (thèse défendue par Giovanni Pasetti http://xoomer.virgilio.it/gpasett/pico.htm) il l’aurait fait lors de son dernier séjour à Florence (1489-1494), juste avant sa mort. Edgard Wind, dans son étude sur la médaille de Pic (in Pagan Mysteries in the Renaissance, New York, 1968) défend l’hypothèse que cette médaille portant la devise PVLCHRITVDO AMOR VOLVPTAS évoque en fait un amour platonique entre l’auteur des Conclusiones et Giovanna Tornabuoni, dont la médaille porte l’inscription CASTITAS PVLCHRITVDO AMOR. Il est donc possible que les fresques aient été peintes lors du dernier séjour de Pic à Florence. Le Poliphile est-il une une allusion à cet amour platonique ? L’homme représenté sur la fresque est-il Pic lui-même ? Le fait que la jeune fille présente sur la fresque serait en réalité une sœur de Giovanna nous avertirait : nous sommes en réalité face à des dieux retournés dans le monde du sensible. Qu’importe qui ils étaient dans leur vie réelle ! Oui, mais cela ne cadre pas avec la troisième fresque qui représentait Giovanni Tornabuoni et sa fille Lucrezia ! »

Le vieil homme, un peu essoufflé par son discours, marqua une pause et sortir un carnet de sa poche.

«  Revenons aux deux médailles ! A la lecture de Wind, il ressort que :

Le texte de Marsile Ficin, dont sont tirées les deux devises, dit en effet :

« Amor igitur in voluptatem a pulchritudine desinit » (Né de la beauté, l’amour prend son terme dans la volupté) (De amore, II, ii). E. Wind interprète ces figures comme une complexe description de l’amour, à la fois terrestre et céleste, comme tripartite (donner, accepter et redonner). Un axiome platonicien, effectivement, voulait que tout dieu exerçât son amour selon un rythme triadique.

« Qui comprend profondément et clairement comment l’unité de Vénus se déploie dans la trinité des Grâces, et l’unité de la Nécessité dans la trinité des Pârques, ainsi que l’unité de Saturne dans la trinité de Jupiter, Neptune et Pluton, sait comment il convient de progresser dans la théologie orphique. »

Pic de la Mirandole, Conclusionesde modo intelligendi hymnes Orphée, nº8.

Dans le groupe de la médaille de Pic, on peut retrouver la triade néo-platonicienne de la procession, de la conversion et du retour. « L’Amour est le Désir que suscite la Beauté », Ficin, De Amore I, IV, Opera II, p. 1322.  Le déplacement de l’accent sur la médaille de Giovanna introduit un ton plus froid qui trahit l’humeur de la femme aimée. Au lieu de la définition platonicienne de l’amour, devise qui sied à un homme, nous avons maintenant une définition platonicienne de la Beauté : « La Beauté est l’association de l’Amour et de la Chasteté », devise qui sied à une femme.

En regard de cela, le projet de l’Hypnerotomachia Poliphili est d’initier l’âme à sa propre destinée secrète – l’union ultime d’Amour et de Mort, à laquelle Hypnos (l’éros funéraire endormi) sert d’image poétique. Le chemin passe par une série de progressions douces-amères où les tous premiers pas préfigurent le mystère d’Adonia, le mariage sacré du plaisir et de la douleur. »

L’historien de l’art rangea ses notes et avala une gorgée de capuccino :

« En fait, je ne pense pas que Pic soit représenté sur les fresques. La dernière hypothèse que j’émettrai sera la suivante : Lorenzo Tornabuoni était très peiné par la disparition de Giovanna. Pic se mit en  tête de rédiger le Poliphile pour lui. A la suite de quoi deux fresques furent commandées à Botticelli : l’une représentant Lorenzo en Poliphile, l’autre Giovanna en Polia.

Voilà, j’ai replacé les fresques de la villa Lemmi dans leur cadre platonicien, en les situant dans leur véritable contexte, celui du songe de Poliphile ! Il ne s’agit que d’une hypothèse bien sûr, mais je la crois valable. Quels que soient les personnages qui s’y trouvent représentés, l’essentiel est qu’ils figurent les mystères platoniciens de l’Amour. Le reste n’est qu’anecdote comme les amours de Dante pour Béatrice Portinari !… »

Giovanni regarda son interlocuteur. Il admirait son raisonnement. Mais dans l’expérience qu’il avait vécue, les fresques avaient bel et bien été réalisées à l’occasion du mariage de Lorenzo et de Giovanna. Cependant, comment le lui dire sans qu’il le prenne pour un fou ? Le lien avec le Poliphile restait mystérieux. Giovanni ne se souvenait pas en avoir entendu parler. Le vieil homme bavarda quelque temps avec le couple puis prit congé. Constanza se tourna alors vers son amant :

« La réalité décrite par cet historien diffère de ce que tu as vécu. N’as-tu pas remarqué que quelque-chose cloche ?

–  Quoi donc ?

– La médaille de Pic et celle de Giovanna ! Dans ton expérience, une médaille a été frappée pour toi. La réalité a été changée.  En fait nous ne saurons jamais ce qu’il s’est passé réellement à Florence à la fin du Quattrocento, ni si Pic a oui ou non rédigé le Poliphile. Occupons-nous d’Ourlandia !

– Ourlandia ?… En Ourlandia il n’y a pas de Giovanna ni de Lorenzo, il n’y a que Laura et moi. Je n’ai pas fait réaliser de fresques par Botticelli à Diansilva et je n’ai pas entendu parler du Poliphile. Il aurait probablement été écrit plus tard, sans cette catastrophe qui a fait de moi un Banni à ta suite.

– Oui, mais ce qui est ne peut plus être défait à présent. Nous ne connaissons plus Ourlandia, mais l’Italie du Quattrocento et le vieil homme nous aurait probablement aidés à en savoir plus !

– Il est parti, n’y pensons plus !… Constanza je suis fatigué de cette vie d’errance dans des univers qui ne sont pas les nôtres. Dois-je t’avouer que Laura me manque ?

– Tout comme mon prince me manque, ainsi que la Bukhovnine ! Mais tout cela n’est plus à présent. Nous sommes seuls dans ce monde étrange, cependant nous sommes ensembles. T’es t’il à ce point pénible de te retrouver en ma compagnie ? Viens ! Sortons, allons nous promener ! »

Giovanni aimait Constanza. L’exil en était moins amer. Il la suivit dehors et ils allèrent flâner le long des canaux.

Naples et Pompéi

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Ils s’étaient rendus à Naples. Ils aimaient cette ville grecque au bord de la plus jolie baie du monde, dominée par la figure altière du Vésuve. Ils se perdaient dans les rues labyrinthiques de la ville populaire, cherchant une taverne, la cathédrale où s’exhibait la crèche de Noël, quoi d’autre encore ? Ils rêvaient à cette Antiquité païenne  qui se donnait au musée d’archéologie, aux batailles d’Alexandre à l’empereur Julien…

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Flore leur promettait un printemps éternel et Homère une Odyssée qui ne finirait jamais. On ne retrouverait plus Ithaque qui s’éclipserait au fil de la croisière comme une île flottante !

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Pompéi était cette belle au bois dormant réveillée après un songe. Dans le temple d’Apollon, ils murmuraient une secrète prière à des dieux oubliés pour se libérer de leur condition de Bannis. Mais les statues de bronze les entendaient-elles depuis que Théodose avait interdit les cultes païens et les sacrifices ? Platon, Plotin, Proclus, Porphyre et les autres avaient-ils la solution dans leur empyrée ? Constanza et Giovanni ne le savaient pas. Ourlandia comme Ithaque s’évanouissait à l’horizon, tandis que la Bukhovnine disparaissait définitivement.

 

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Guelfes, gibelins et trouvères

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Mon arrivée dans la République de Florence, je veux dire mon retour se fit dans des conditions vaudevillesques : le gonfalonier, je veux dire le comte, même pas le duc était parti à Pise avec la caisse. Il se trouve que la République est la plus riche contrées de tous les royaumes. Je me fis des alliés chez les Lombards et les elfes, et travesti, moi l’ex condottiere sous les traits d’un trouvère errant en quête de sa Dame, je me mis à observer. J’appris bientôt que Florence se taillait un empire en Italie et que l’empereur ou ce qui se prétendait tel refusait d’intervenir militairement en Toscane. Enfin c’est ce que disait l’organe de presse des Royaumes, contrôlé par une papauté simoniaque et hérétique, traquant impitoyablement les renards dans les vignes du Seigneur sous couverts d’aristotélicisme sclérosé dans de vaines querelles scolastiques et que l’on voudrait bien voir inspiré par le bon docteur angélique. Moi qui essayais de lire Platon depuis que Constantinople était tombée et qui croyais un peu trop en l’action de l’Esprit Saint dans le monde, je me cachais et je craignais de devoir me dissimuler dans quelque couvent dominicain à Venise sans avoir revu ma Dame que l’on disait ressuscitée du côté de Modène.

 

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Albizzi

Giovanni avait repris le nom de sa Dame d’autrefois, même s’il aimait beaucoup Constanza. Il chevauchait vers l’Italie à travers les sentiers alpestres. Il avait repris ses titres aussi. Continuant sur sa lancée, il progressait à travers les campagnes enneigées et les villes à la fois antiques  et modernes, avec leurs murailles et leurs tours crénelées, leurs cheminées d’usines et leurs aéroports. A travers le col de Fréjus endormi d’un manteau immaculé, évitant  à la fois les loups et les brigands, il était redescendu vers Milan où, tel Fabrice del Dongo suivant les armées napoléoniennes (ou peut-être ne retenait-il pas correctement ses lectures ?), le long du lac de Garde ou de Côme comme dans le passé, il était entré tout caparaçonné d’argent, portant haut et fort le sable et les anneaux d’or concentriques des armes de sa Dame, avec en chef la croix teutonique signifiant autrefois la gibeline alliance.  Puis,  lentement, à dos de cheval, il était redescendu trottinant vers la République génoise, ses navires armoriés et ses marchands fortunés, rêvant à quelque impossible quête d’une carte oubliée,  laquelle perdue dans quelque bibliothèque  évanouie, à Dieppe ou à Lisbonne,  l’attendrait peut-être, il ne savait plus. Il rêvait de nouveau :  poursuivre son chemin vers la République aux lys rouges ou d’argent. Mais quelle  importance à présent ?

 

Sonnet

 

Aultre fois en France duc de Diansyl

Bel royaume de majesté tonnant

L’Anglois boutoit en leur belle île

Albe comme neige au soleil brillant

 

Jourd’hui, marri sur routes dolent

D’Italie la noble la guelfe blanche

Lunissants  gibelins s’étonnant

Lys rouges   renaissants pure rose sur branche

 

Belle et chaste rêve ma Dame d’Albizzi

LAUra la grande aux boucles franches

Riant chantant son bel ami

Louant vibrant les bleus yeux pervenche

Giovanni da Diansilva cavaliere degli Albizzi

 

Sur les routes d’Italie, un autre sonnet lui était venu à l’esprit :

 

Nymphe jolie au cœur de reine blanche

Jardin dormant près des cygnes chanteurs

Petit ange renaissant et franche

Albe dorée, belle France sonneur

Lys de gueules sur bel argent issants

Chant nouveau de belle fleur chaste

A vie nouvelle bientôt reluisant

Bel palais fleurant nobles noces fastes  

 Tendre nuit ivresse d’un grand bonheur

Si belle dame fêtant son beau sire

Prince de France d’azur lys d’or honneur

Lion de Bourgogne pardonnant son ire

 

Il marchait sans crainte maintenant parce qu’il avait compris que Laura était revenue parmi les vivants, sa belle dame chaste au lys et à la rose, la gloire de Florence la sainteté de l’Eglise romaine choisie par l’Esprit pour servir Israël et rendre grâce au Fils de l’Homme avec l’humilité que l’on devait montrer devant le Père car l’Eternel abhorre les orgueilleux, est juste comme un père et aimant comme une mère.

 

Elle viendrait la noble fille d’Hercule, la princesse d’Hyperborée pour qui son père avait réalisé ses douze travaux, elle viendrait et serait la gloire de la cour de Modène, la perle d’Italie.

 

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De son portrait par Léonard on ne saurait que dire, réalité ou contrefaçon, personne ne saurait trancher. Cependant on reconnaissait bien là son noble profil.

 

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Elle était la gloire de l’Italie, entourée des artistes et des philosophes les plus brillants. On vanterait sa justesse d’esprit et la clarté de ses propos. Elle connaîtrait toutes les langues, saurait disserter en grec et en latin sur n’importe quel sujet même les plus complexes, car elle était l’aimée du Seigneur, la chaste fiancée.